Protéens

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L’esprit divin ne sut entrevoir le massacre à venir. Nous ne sûmes démêler les probabilités pour aboutir à un résultat nettement défini, même après des centaines de milliers de cycles de calculs ininterrompus. Passé un certain point, le chaos du Maelström invalide les conjectures, et jamais nous ne nous étions retrouvés dans une telle situation. « Qu’il en soit ainsi, » déclarèrent les protéens, et le Vide céruléen s’empara des lisières des Abysses et les ouvrit telle une plaie purulente, révélant l’infection qui le rongeait comme notre ruine à tous.

— 19e précepte du Second pic, au sujet de la proclamation du Seigneur sans couleur.


Connus sous différents noms (les précurseurs du Chaos, les enfants du Vide céruléen et les seigneurs du Maelström), les énigmatiques et serpentins protéens figurent parmi les plus redoutés et les plus incompris de tous les natifs des plans. Capables d’actes de création stupéfiants comme de destruction tout aussi brutale, les protéens voient l’univers comme un terrain de créativité illimité. Même s’ils n’ont pas la malveillance sanguinaire des fiélons ni de hiérarchie inflexible ou autres dirigeants fédérateurs, beaucoup considèrent les protéens comme une menace capricieuse pour tous les autres plans, une vague dévorante de chaos qui rôde au-delà des frontières instables des régions du Maelström. Mais leur véritable nature, considérée sous toutes ses facettes changeantes, est bien plus complexe que cela.

histoire

Au vu de la nature instable et éphémère du Maelström, d’aucun pourrait croire que l’histoire de ce plan serait bien mal renseignée, à part les rares chroniques aux perspectives limitées de quelques visiteurs. Mais si l’histoire du Maelström et de ses occupants chaotiques est décrite avec force détails par les historiens et les érudits de l’Axis, ainsi que par leurs homologues du Paradis et des Enfers de manière tout aussi détaillée mais nettement plus biaisée, les protéens jouissent également d’une connaissance étonnamment approfondie de leur propre histoire. Bien entendu, il n’est pas aisé de se procurer ce genre de savoir : on pourrait s’aventurer dans les profondeurs du Maelström lui-même dans l’espoir de consulter l’une des kabbales de kékétars, voire l’un des uniques seigneurs protéens, et obtenir un aperçu de leur passé, mais seulement au prix de risques excessifs. Sinon, les membres de la caste des imenteshs, rencontrés hors du Maelström, acceptent souvent de fournir toutes les informations qu’on leur demande. Mais chaque parole que délivre leur langue fourchue est un moyen de manipuler leurs auditeurs et de les amener à servir les objectifs de leur peuple ou de leur chœur. L’histoire de la réalité qui suit peut aussi bien être la vérité qu’un mensonge, mais pour les protéens, elle est suffisamment factuelle.

Avant que la structure actuelle des plans Extérieurs n’existe, il n’y avait que le Maelström, éternel, pur et inaltéré par ce cancer qu’est la stabilité. Antérieur aux autres plans depuis des temps immémoriaux, il était sans doute tel qu’il est aujourd’hui : un océan immense et infini de probabilités brutes et chaotiques, qui s’étire entre les réalités.

Les protéens tiennent à leur statut de natifs originels du Maelström primitif, lieu de pure et ultime liberté avant la formation (ou l’arrivée) des autres plans. Pour la plupart, les autres extérieurs respectent cette affirmation sans faire de commentaires. Mais d’autres légendes, qui s’éloignent de cette histoire, supposent que si les protéens furent en effet la première race de natifs à émerger du Maelström, soit ils n’existaient pas comme des créatures distinctes, soit ils ne vinrent à la vie qu’après un évènement particulier. Avant cet évènement inconnu, le chaos du Maelström se refusait tout simplement à intégrer la vie au-delà d’une seule génération : elle émergeait de son essence puis y retournait, là d’où elle était sortie. C’est sans doute suite à la formation du plan Matériel par des créateurs inconnus, ou à la séparation tumultueuse d’étranges entités d’énergie positive et négative, que les protéens apparurent en tant que race distincte, comme les cellules et les anticorps du système immunitaire d’un être vivant se forment en réaction à une infection ou à une irritation.

Qu’importe leur nature originelle, les protéens furent effectivement les premiers natifs de la Sphère extérieure. Cependant, ils ne régnèrent pas longtemps seuls puisque, à mesure qu’ils exploraient leur nouveau royaume, cette seule exploration mit la réalité à l’épreuve. En certains endroits, la trame même de la Sphère extérieure se déchira et s’ouvrit sur d’étranges et sombres failles dans l’infini. On ne sait pas exactement si ce qui vit au cœur de ces failles existait avant d’être exposé à la Sphère extérieure, mais il est certain que lorsque la connexion fut établie, ces failles devinrent l’une des plus grandes obsessions des protéens, car elles contenaient également la vie. Elles s’ouvrirent sur les Abysses, et ce qu’elles abritaient fut désigné sous le nom de qlippoths.

Les Abysses devinrent la hantise d’une faction renégate et hérétique de protéens kékétars, comprenant le chœur de la Discorde tranchante et le chœur de la Symétrie maligne. Ils lancèrent d’innombrables expéditions dans ce nouveau royaume et finirent par déclencher un violent conflit avec les qlippoths. On ignore si ces derniers auraient pris conscience de la Sphère extérieure à temps, mais il est certain que les actions de ces kékétars précipitèrent les évènements, et la guerre s’étendit très vite hors des Abysses et jusqu’au Maelström lui-même. Leur influence se répandit très loin dans le Grand Au-delà avant qu’ils soient repoussés dans les sombres et abominables profondeurs des Abysses. Mais les qlippoths avaient déjà fait des ravages : ils laissèrent leur marque sur la réalité et, de manière bien étrange et ironique, cette guerre est peut-être bien responsable du reste de sa formation.

Les protéens soutiennent que ce fut lorsque cette guerre abyssale les déstabilisa que d’autres plans prirent racine dans le Vide céruléen. Tandis que les protéens se battaient contre les qlippoths, ils n’eurent pas le temps de les déstabiliser suffisamment pour les repousser dans l’étreinte du Maelström. L’ordre exact de formation des nouveaux plans demeure incertain, et les protéens prennent rarement la peine de discuter de cet aspect de l’histoire, considérant qu’il s’agit de la plus grande honte et du plus grand échec de leur peuple.

Les protéens affirment que l’Axis apparut peu de temps après que les Abysses eurent ouvert leurs cryptes, comme une épine empoisonnée venue d’une tout autre réalité dans le pied du Maelström. Il s’étendit et donna naissance à quelque chose dont la nature dépasse de loin celle des Abysses : il ne se contenta pas d’instaurer un équilibre mais imposa également un ordre et des frontières au Maelström. En proie à un incessant désir de pacifier, de définir et d’organiser, les axiomatiques natifs de l’Axis entrèrent directement et durablement en conflit avec les protéens. La première réaction majeure de ceux-ci, comme les kékétars la décrivent, fut de « vomir l’acerbe refus des Abysses à noyer les usurpateurs de réalité. » Depuis lors, l’histoire des plans se résume à une tentative mutuelle et pratiquement constante de génocide, qui s’étend à d’autres groupes à mesure de l’évolution des plans.

Selon divers historiens imenteshs, après que ces plans incontrôlables et les intrus voisins se furent unis dès leurs premières heures, les dieux apparurent « d’ailleurs ». Cet événement entraîna une confusion apparemment égale entre les protéens et les divinités, alors qu’ils découvrirent leur nature réciproque. Déjà préoccupés par de multiples conflits, les protéens entrèrent en contact avec ces divinités comme ils le font encore aujourd’hui : avec prudence et au cas par cas. Par exemple, ils considèrent Néthys comme une âme sœur, ne nourrissent aucun sentiment spécifique envers Sarenrae et embrocheraient volontiers le cadavre d’Asmodéus sur la grande flèche de Pharasma s’ils le pouvaient. La situation est pour l’instant en équilibre précaire. Les protéens espèrent, en grande majorité, reporter tout conflit éventuel avec les dieux (si conflit il doit y avoir), le temps de s’occuper des Abysses et des occupants des plans Loyaux.

SOCIÉTÉ ET CASTES

La société protéenne (telle qu’elle existe) tourne essentiellement autour de trois castes protéennes majeures : les naunets, les imenteshs et les kékétars. Hormis ces trois distinctions générales, la plupart des autres différences sont secondaires.

Pour la plupart des observateurs, les protéens ne présentent aucune forme de dimorphisme sexuel et semblent, en réalité, ne posséder aucun genre apparent. Au vu de la nature imprécise de l’anatomie protéenne, ces extérieurs Chaotiques sont d’un, d’aucun, ou, le plus souvent, des deux genres à la fois. Cette « fluidité » anatomique n’a d’importance réelle que lorsque deux (ou plus) de ces créatures s’accouplent en vue de procréer ou pour le simple plaisir de l’acte. La plupart des protéens (tout du moins les membres des castes de naunets et d’imenteshs) ont tendance à venir au monde non par le biais d’une naissance ordinaire, mais en se formant spontanément à partir d’éléments bruts du Maelström ; et si les détails sont encore sujets à de violents débats, les protéens semblent plus que disposés à transformer les âmes mortelles en protéens, tout comme les autres extérieurs le font à leur manière.

langage

De la même manière que la nature éternellement instable du profond Maelström est toujours en mouvement, le langage protéen a toujours été un cauchemar pour les linguistes planaires puisqu’il évolue et s’écarte radicalement de toute autre langue connue. Heureusement, la vie des mortels est suffisamment courte au regard du grand dessein de l’univers pour que, ces changements mettant des années à se concrétiser, quelqu’un qui parle cette langue puisse encore la comprendre dans la plupart des cas, même après une décennie ou plus. Néanmoins, les décalages se produisant à intervalles irréguliers apparemment aléatoires, la plupart des gens, hormis les érudits les plus obsessionnels, parient généralement sur le fait qu’un protéen donné saura parler une langue plus stable que la sienne ou s’appuient simplement sur une traduction magique.

Le protéen parlé (tout du moins sifflé) mis à part, le protéen écrit constitue un autre cauchemar, tout particulièrement depuis que les érudits se disputent quant à savoir s’il existe réellement. Si la couronne tourbillonnante illusoire d’un kékétar se compose de dizaines, voire de centaines de symboles, ceux-ci n’ont aucune signification hormis un thème général et quelques signes uniques propres à l’individu. Certains érudits pensent que les couronnes elles-mêmes sont la manifestation d’un langage écrit, mais si cela est vrai, la taille de son lexique serait vertigineuse. Au-delà des kékétars, il existe d’autres exemples de textes profondément enfouis dans le cœur mouvant des prétendus monuments et autres bâtiments protéens. L’un de ces endroits, la vallée Ouroboros, apparaît comme une chaîne circulaire de montagnes à la dérive, échappant à toute topographie conventionnelle et centrée sur un étrange monument liquide. L’objet change constamment de forme : ensemble d’anneaux emmêlés, trois piliers ou plus et des configurations plus bizarres encore. À chaque changement, le monument devient translucide et la lumière qui le traverse projette au sol l’ombre d’un champ parsemé de textes étranges, ainsi que les sombres silhouettes de différents protéens.

Mais comme avec la langue protéenne parlée, la plupart des érudits recourent par défaut à la traduction magique de tous les textes protéens et, même alors, les diverses tentatives donnent parfois différents résultats avec de subtiles variations dans la signification.

noms

De nombreux noms protéens ont une structure double incluant un nom propre au langage sifflé, incroyablement complexe, et un titre ou descripteur. Il est souvent facile d’obtenirune traduction dela deuxième partie par l’utilisation de la magie, tandis que la première résiste généralement à toute traduction : elle reste ainsi une partie du nom du protéen dont les non protéens ne se soucient guère. Il arrive néanmoins que l’on parvienne à traduire l’intégralité du nom du protéen, avec très peu de différences visibles entre la structure originale du nom et celle de n’importe quel autre protéen. Des protéens tels que Chant du Tendre Poison et Cri sifflant de la Tempête portent souvent leur nom comme descripteur de leurs actions et, lorsqu’elle s’applique, de l’idéologie générale du chœur qu’ils servent.

naunets

Les plus bestiales des forces protéennes semblent n’avoir aucune notion de culture ni même de pensée rationnelle. Bien entendu, on les rencontre le plus souvent aux frontières du Maelström, ainsi qu’en dehors de celui-ci lors de leurs fréquentes incursions de masse sur les autres plans de la Sphère extérieure. Dans le cas des rencontres aux frontières, les naunets attaquent généralement à vue, non pas à cause d’une quelconque soif de sang mais parce que de grands groupes de leurs semblables y rôdent. Ces derniers sont déjà prêts à déchaîner leur violence du fait de leurs infiltrations sur d’autres plans, ou ils sont à l’affût des invasions menées par les armées du Paradis, des Enfers et de l’Axis.

Dans tous les cas, les naunets sont pratiquement toujours préparés à la sauvagerie des visites de leurs ennemis, et les voyageurs doivent s’attendre à recevoir un accueil similaire de la part d’un archon, d’un diable ou d’un axiomite. Hors des frontières, la réponse est semblable mais souvent plus extrême dans la mesure où la nature structurée et définie de la réalité des plans en dehors du Maelström (même des plans Chaotiques de l’Élysée ou des Abysses) déchaîne la fureur des naunets à un degré hallucinant, voire même les fait souffrir physiquement.

Ainsi, il serait plus juste de dire qu’en dehors des profondeurs du Maelström, les naunets présentent un aspect monolithique et destructeur. Lorsqu’ils sont dans leur environnement d’origine et loin des objets de leur haine, ils se comportent différemment. Livrés à eux-mêmes, séparés des imenteshs et des kékétars, les groupes de naunets sillonnent les profondeurs du Maelström tels des bancs de dauphins, filant un à un comme des flèches dans les décors éphémères et instables de ce plan, chassant les autres natifs qui le peuplent, voire même les créatures uniques émergeant du chaos brut lui-même. Évidemment, s’ils sont loin d’être des artisans de la réalité métastable du Maelström, comme leurs cousins imenteshs, les naunets ont un étrange don de créativité pour façonner le chaos brut du Maelström. En réalité, les plus grands groupes de naunets se font souvent concurrence quand il s’agit d’apporter des changements de plus en plus élaborés au paysage, grâce à leurs mouvements complexes et soutenus, sapant souvent les créations des autres pour ajouter de nouveaux éléments de chaos à leurs travaux en cours.

Au-delà de la dimension prédatrice et fantasque de leurs activités, les naunets adorent se parer de motifs et de symboles lumineux qu’ils peignent au moyen des pigments et des minéraux qu’ils récupèrent, ou qu’ils extraient de la matière brute du Vide céruléen. Bien entendu, ces peintures se dissipent, s’évaporent ou se consument rapidement telle une pâle flamme d’alcool lorsqu’elles sont arrachées à leur réalité mutable originelle : ainsi, rares sont les observateurs qui sont les témoins de la gloire artistique des naunets et, par conséquent, leur réputation de violents agents du chaos destructeurs et barbares reste l’image prédominante que l’on se fait d’eux.

Célèbres protéens naunets

Bien que tous les naunets soient connus pour leur force, leur férocité et leur caractère imprévisible, certains se démarquent comme de remarquables membres de leur espèce.

Névriss au Feu d’or. S’imposant d’emblée comme le parangon des exploits de ses semblables au-delà du Maelström, cet énorme naunet est coiffé d’un casque taillé dans le crâne de Garilax de Malebolge. Anciennement au service de Moloch, ce commandant cornugon fut massacré avec son armée à peine une centaine de kilomètres après avoir passé les frontières du Maelström, désorienté et rendu malade par une violente tempête de chaos générée par les défenseurs du plan. Selon les récits des quelques survivants diaboliques, corroborés par les dires d’un scalde imentesh, le diable fut étouffé par sa propre main droite, démembrée et plongée dans sa gorge par le naunet Névriss. Névriss consuma ensuite son corps, à l’exception de la tête qu’il ramena au fond du Maelström afin de la faire décorer comme un trophée par les imenteshs et les kékétars de son chœur. Tel qu’il est désormais, finement gravé et incrusté de filigranes d’argent, le crâne renferme encore une partie de l’essence originelle du diable, qui réagit parfois avec le métal, créant ainsi un halo ardent autour du corps de son assassin.

H’sshineth la Cacophonie dévorante. En tant que membre du chœur de la Spirale bouillonnante, le naunet H’sshineth cherche à purifier la réalité de la corruption maléfique des Abysses, à n’importe quel prix. Pendant plusieurs milliers d’années (tout du moins selon les protéens de son chœur), il massacra personnellement plus d’une vingtaine de vrocks et trois fois plus de babaus avant de disparaître dans les profondeurs des Abysses, en quête d’une proie plus importante. La plupart pense qu’il finit par mourir après sa descente suicidaire, loin du Maelström et du reste de son chœur (mais ce n’est peut-être pas le cas). Il arrive, de temps à autre, que l’on fasse état de seigneurs de guerre démoniaques inférieurs, ainsi que des émissaires et ambassadeurs de leurs maîtres, retrouvés morts, le corps démembré et disposé de façon à former le trio de sceaux gravés sur les écailles du torse de H’sshineth, le symbole de la Spirale bouillonnante inscrit en lettres de sang juste en dessous.

IMENTESHS

Destructeurs sournois, artisans du chaos, peintres, chanteurs, hérauts et scaldes de l’instabilité, les protéens imenteshs montrent un visage déconcertant au monde extérieur. Généralement considérés comme les moins ouvertement hostiles, voire même comme loquaces à côté des naunets qui les accompagnent souvent lors de leurs incursions dans les régions frontalières, ils possèdent un don pour la subtilité, uniquement égalé par leur dévotion fanatique et quasiment religieuse à provoquer la dissolution de la réalité au-delà des frontières du Maelström.

Diamétralement opposés à leurs cousins naunets, les imenteshs préfèrent propager la vérité du chaos en usant de mots et de manipulations subtiles plutôt que par la destruction. S’il est possible de semer la confusion et la discorde au sein des légions des Enfers en encourageant les conflits entre ses archidiables, s’il est possible de faire circuler des rumeurs de ferveur impie et autres calomnies de génocide sur les archons des cours du Paradis, et si les luttes intestines divines peuvent faire s’effondrer les fondations de l’Axis sans que la race protéenne n’ait une seule goutte de sang sur les mains, alors ainsi soit-il. Le Chaos comprend toutes les possibilités, et les imenteshs les cherchent et les exploitent avidement, comme un équivalent à la force brute et destructrice des naunets.

Les imenteshs se laissent sans cesse aller à leur immense curiosité. Un seul imentesh parcourant les régions frontalières du Maelström peut passer des jours, voire des semaines, à observer une ville ou un unique individu, à apprendre ses habitudes, sa langue et tout ce qui peut titiller sa curiosité fantasque, qu’il s’agisse de savoir quelle couleur les cheveux d’un azata ont à la lumière du soleil à une certaine heure, ou de découvrir l’odeur de bile de l’haleine d’un dretch. Bien entendu, tout ce qu’apprennent les imenteshs les aide à infiltrer d’autres plans lorsqu’ils le désirent.

Les imenteshs accompagnent souvent les groupes de naunets, fournissant à leurs compagnons un important soutien magique sur les champs de bataille. Mais le plus souvent, les naunets, destructeurs, font office de gardes du corps pour les imenteshs, les protégeant jusqu’à ce qu’ils atteignent un plan ou un portail particulier vers lequel ils se sentent attirés. À partir de là, les imenteshs se dissimulent en se faisant passer pour des natifs du royaume en question et poursuivent leurs objectifs, qu’il s’agisse de récupérer des informations pour une exploitation ultérieure ou un subterfuge en cours. Puis, à nouveau, en dehors des plans Loyaux, ils peuvent laisser tomber leurs déguisements et se servir de cette ouverture apparente comme d’un outil pour rallier des auditeurs à leurs discours.

Au sein du Maelström, les imenteshs passent leur temps à altérer leur environnement d’origine. Tels des artistes dotés d’une inspiration sans limite face à des toiles mutables et infinies, ils s’occupent individuellement en ajustant des parties du Vide céruléen selon leurs goûts, en réarrangeant le paysage et même en créant de toutes nouvelles zones radicalement différentes. Et comme pour la plupart des protéens, plus ils sont nombreux à se rassembler, plus ces changements sont profonds, les médiocres tentatives des naunets faisant pâle figure à côté des œuvres imenteshs de distorsion de zone. Conformément à leurs dons artistiques et créatifs, les imenteshs créent souvent des objets à la fois ordinaires et magiques et se les offrent entre eux, ainsi qu’aux naunets qui se mettent en marche (ou en nage) pour les frontières où éclatent les conflits. De la même manière que leurs cousins ont un penchant pour l’auto-décoration, les imenteshs gravent souvent les écailles de l’arcade entourant l’œil de motifs complexes et, s’ils en possèdent à un moment ou à un autre, décorent leur collerette, leurs cornes ou leurs pointes de bandes de métal conjuré et sculpté. Il arrive fréquemment que les imenteshs drapent leur abdomen et leur queue de bandes de vêtements imprimés de motifs encrés ou décolorés, se rapportant généralement à leurs objectifs en cours et au chœur auquel va leur loyauté du moment.

Célèbres protéens imenteshs

Les membres les plus influents de la caste des imenteshs sont rarement reconnaissables. Agissant de manière à étendre l’influence du chaos sur les plans, ils trouvent plus sage de garder leur identité secrète face à ceux qu’ils pourraient corrompre ou manipuler.

Le Cri sifflant de la Tempête. Cet imentesh maigre comme un clou a souvent l’air maladif ou affamé, et est enveloppé de riches étoffes pourpres piquées d’or. Mais malgré la faiblesse de son état, il affiche une force tranquille et une détermination qui ne sont pas sans rappeler un moine ascète qui trouve la sagesse dans l’exil volontaire (et, dans une certaine mesure, c’est ce qu’il est). Plutôt que d’arpenter les plans limitrophes au Maelström, le Cri sifflant de la Tempête vit dans la Plaie du Monde, sur Golarion, chevauchant les espaces qui séparent le plan Matériel et les Abysses, et a en effet beaucoup souffert de sa séparation d’avec le Maelström.

Toujours dissimulé derrière un voile, se déguisant parfois en simple paysan humain, en paladin du Mendev, ou prenant l’apparence de l’une des nombreuses variétés de démons vivant dans la région, le Cri sifflant de la Tempête surveille de très près chacune de ces factions. Risquant sa vie en étant si loin du Vide céruléen et privé de l’essentiel de sa puissance pour distordre le paysage dans un environnement aussi statique, il est parvenu à empêcher la Plaie du Monde de trop se modifier – cette créature du chaos protège paradoxalement l’équilibre. Potentiellement impliqué dans la découverte mendévienne du nexavar ou dans son utilisation pour la construction des pierres de garde qui retiennent les vagues démoniaques, ses intentions sont tout sauf bienveillantes : il monte les fiélons les uns contre les autres, les affaiblissant juste ce qu’il faut pour éviter de complètement massacrer les croisés humains tandis que, d’autres fois, il s’arrange pour retourner la vague sanguinaire contre ces défenseurs humains.

La Muse de l’Imprévisible. Parée de vêtements blancs et verts, et portant une gemme de vision lucide d’un émeraude scintillant, enchâssée dans les écailles de son front comme un troisième œil mystique, la Muse de l’Imprévisible explore ouvertement les régions limitrophes de l’Élysée sans se donner la peine de se déguiser. Approchant souvent les autres voyageurs afin de discuter longuement avec eux, elle a passé des années avec les lillendes natifs errants qui la respectent, quand ils ne lui font pas entièrement confiance, et apprécient ses fantastiques capacités d’artisane et son répertoire apparemment infini d’histoires des autres plans. Que les lillendes en aient conscience ou non, elle est en permanence suivie de près par les serviteurs de nombreux seigneurs azatas, et la question qui se pose est de savoir si les intérêts de la Muse de l’Imprévisible coïncident avec ceux des lillendes ou au contraire sont opposés aux leurs.

KÉKÉTARS

Les kékétars fonctionnent comme une caste dominante parmi leurs semblables. Contrairement aux naunets et aux imenteshs, ils ne se forment pas directement à partir des âmes mortelles, même si la controverse quant à savoir s’il leur arrive, au moins en de rares occasions, d’émerger spontanément du Maelström est bien réelle. D’autres preuves suggèrent que chaque kékétar a été élevé à sa position, endossant sa nouvelle forme et ses nouvelles responsabilités comme un prêtre répond à l’appel de son dieu.

Les kékétars présentent la plus grande diversité physique parmi les castes protéennes et, s’ils altèrent souvent leur taille, leur couleur et pratiquement toute autre caractéristique corporelle mineure, deux éléments particuliers les distinguent en tant que caste : leurs yeux et leur couronne. Les yeux des kékétars brillent toujours d’une nuance frappante d’ambre ou de violet (en fonction de leur lignée), et au-dessus de leur tête flottent, tels une couronne, des nuages tourbillonnants de symboles toujours changeants. Mais en plus de leur couronne (chaque individu se caractérisant par un élément stylistique unique), les kékétars peuvent adopter les peintures des naunets, les bandes de vêtements colorées des imenteshs, les fourreaux de métal liquide forgés dans le chaos du Maelström, ou rien d’autre que leurs propres écailles. Les modes vestimentaires et ornementales varient d’un individu à l’autre, mais on observe quelques similitudes dans les rassemblements spéciaux de leur espèce.

Dénuée de toute notion d’organisation régulière, la sous-espèce des kékétars se répartit en un nombre impressionnant de kabbales semblables à des sectes et connues sous le nom de chœurs, chacun se composant de un à une vingtaine de membres de cette espèce. Au sein de chaque chœur, les membres ont une vision unique et commune de la volonté du Maelström et leur propre façon de l’appliquer. Les kékétars de chaque kabbale pressentant de manière collective cette vision particulière, ils attirent les naunets et les imenteshs désireux de mener leurs objectifs à bien.

Néanmoins, les kékétars ne font pas simplement office de prêtres-rois qui restent à l’écart des fronts sanglants de leurs propres croisades. Lorsqu’ils ne se réunissent pas pour affiner leur vision de la volonté du Maelström, ils sillonnent souvent celui-ci, ses régions limitrophes et même les autres plans situés bien au-delà, si cela peut les aider à servir leurs buts.

Célèbres protéens kékétars

Parmi les partisans du chaos, plusieurs kékétars se distinguent de leurs pairs en cela qu’ils sont de véritables fanatiques de la puissance indicible du Maelström. Le chœur de la Lune affamée et du Tombeau ouvert. Si de nombreuses kabbales de kékétars n’ont pas de nom et restent majoritairement incomprises dans leurs objectifs, le chœur de la Lune affamée et du Tombeau ouvert a depuis longtemps perdu la possibilité de passer inaperçu. Pour faire simple, ce groupe de neuf kékétars cherche à détruire la grande flèche de Pharasma pour relâcher les occupants du Cimetière des âmes, afin que le demi-dieu Groetus s’en repaisse et, ce faisant, sème la ruine sur la Cité parfaite de l’Axis et détruise le fragile équilibre qui maintient l’ordre des plans. Naturellement, le chœur doit faire face à l’opposition active de la plupart des dieux Bons et Loyaux, et tout particulièrement de Pharasma elle-même (bien que cela n’ait pas de conséquence évidente sur ses relations avec la race des protéens dans son ensemble, ni apparemment avec cet unique protéen qu’est Ssila’meshnik). Curieusement, le nombre de kékétars de ce groupe ne change jamais, restant toujours à neuf malgré la mort, certes rare, de certains de ses membres : un nouveau kékétar émerge à chaque disparition pour combler le vide, « inspiré par le murmure et le baiser du Maelström ».

Mek’m’liis, le Premier Devin muet. Membre du chœur du Serein Éclat, contrairement à tous les autres kékétars, Mek’m’liis ne porte pas de couronne : voilà plusieurs siècles, il en fut privé par un puissant magicien mortel qui chercha à le lier magiquement pour en faire un serviteur. S’il y parvint, les termes du contrat n’empêchaient en rien le chœur du protéen de se venger. Suite à l’effacement du demi-plan d’origine du magicien, le focalisateur renfermant la couronne volée de Mek’m’liis disparut sans laisser de trace.

Le lien de Mek’m’liis, dépouillé de la marque de son grade, affecta ses compagnons kékétars et leurs partisans (comme une malédiction en pleine expansion), transformant de manière permanente la couleur de leurs yeux en un jaune perçant, dépourvu de pupille, ce qui les rendit aveugles et valut son titre à Mek’m’liis. Le kékétar cherche désormais par tous les moyens à inverser la malédiction et conclut assez souvent des marchés temporaires avec les vagabonds des frontières et, par l’intermédiaire de mandataires imenteshs, avec les individus d’autres plans, leur offrant un sursis contre les attaques protéennes et une protection contre le flux du Maelström.

Le Murmure vacillant des conséquences. Membre du chœur du Silence corrosif, ce kékétar a le corps lacé d’un tissu cicatriciel aux marques entremêlées, dont la patine change constamment et dont le mouvement épouse la fluidité de sa couronne. Comme beaucoup de membres de son espèce, il quitte rarement les profondeurs du Maelström et s’est occupé, des siècles durant, de construire et de manipuler une immense tempête vivante, ainsi que l’énorme flocon de neige cristallin qui repose en son cœur. Attirés et piégés par le kékétar, des fragments de la tempête s’abattent sur les frontières et font disparaître les non natifs en masse, tout en nourrissant l’environnement. Ce déchaînement paraît complètement aléatoire, à l’exception d’un certain nombre d’occurrences troublantes de cyclones individuels qui se sont détachés pour cibler des célestes, des fiélons et même des mortels arpenteurs de plans spécifiques. Les survivants devinrent la proie d’horribles cauchemars dans lesquels le kékétar scarifié leur susurrait, sur un ton alternant entre l’adoration et la malveillance, de rejoindre le Maelström. Il fallut moins d’un an pour que chacun d’eux succombe, en s’évanouissant dans la nature ou en se suicidant.

religion

Si les protéens devaient avoir une caractéristique commune et unificatrice, ce serait la religion de leur espèce. Tandis que les azatas, fantasques mais d’alignement Bon, vénèrent beaucoup de dieux ou aucun, et que les fiélons des Abysses révèrent leurs nombreux seigneurs démons, les enfants du Maelström sont dévoués à quelque chose d’à la fois plus abstrait mais immédiatement tangible. Pour faire simple, les protéens vénèrent le Maelström lui-même, traitant le Vide céruléen comme une entité vivante : ils se considèrent comme ses enfants et les agents de sa volonté et de son individualité.

Bien entendu, en tant qu’êtres de pur chaos, les protéens considèrent l’idée même de dogme religieux comme un principe à mi-chemin entre l’absurdité et l’obscénité. Ils consacrent leur existence à l’exploration des merveilles infinies de la volonté du Maelström, et certaines notions d’ordre général imprègnent leurs actions au sein de ce plan et au-delà.

Tout d’abord, les protéens méprisent l’ordre imposé et la stabilité. Dans une certaine mesure, chaque chœur exprime ce sentiment à travers la philosophie qu’il transmet aux protéens qui la suivent, et qui conditionne leurs actions, ainsi que leur conception des autres plans et des non natifs du Maelström.

Ensuite, les protéens respectent l’acte de création, tout particulièrement lorsque le créateur prend plaisir à l’effectuer au lieu de recracher du par cœur ou de le considérer comme une obligation. Bien entendu, les créateurs vivent pour la seule création, pas nécessairement pour l’objet créé qui doit être détruit d’une manière ou d’une autre.

Enfin, les protéens expriment leur foi non pas par la prière et les rituels, ni au travers d’un quelconque culte organisé, mais par des actes qui encouragent et symbolisent le credo de leur espèce, tout se résumant en fin de compte à satisfaire les entités qui sont au cœur de leurs mystérieuses croyances.

Les Orateurs des profondeurs

De tous les mystères du Vide céruléen, la nature et l’identité des dieux-créateurs duals des protéens, les Orateurs des profondeurs, sont les plus grands. Les kékétars semblent incapables d’en dresser un portrait complet aux non protéens et passent l’essentiel de leur vie en communion mystique avec ces entités, mais la compréhension parfaite de leur véritable nature semble uniquement possible dans les moments où ils canalisent directement leur influence. Leur complexité est accentuée par une barrière linguistique réfractaire. Par exemple, la traduction magique des descriptions des Orateurs est souvent confuse et mélange les singuliers et les pluriels, ainsi que les genres avec une étonnante fluidité, même si ce dernier point pourrait tout simplement correspondre à la particularité de la physiologie protéenne, appliquée dans la langue de leur espèce.

Les deux descriptions principales viennent de différents kékétars ainsi que de nombreux diables, archons et axiomites qui ont été témoins des manifestations ostensibles des dieux protéens sur les champs de bataille. La version protéenne parle de deux serpents jumeaux et parfaits se fondant l’un en l’autre, mêlant à la fois leur forme physique et leur identité spirituelle, créant le monde autour d’eux tout en le dévorant et en se dévorant l’un l’autre. N’étant pas habités ni investis par la présence de leurs créateurs, les protéens sont incapables de se prononcer davantage sur leur nature, recourant à un langage qui suggère que le Vide céruléen lui-même serait une troisième manifestation de leur double symétrie.

D’un autre côté, la description qu’en font les ennemis des protéens est plus franche et plus terrible. Azragei le Fourchu, un cornugon au service de Dispater, décrivit comment un cercle de protéens kékétars, « leurs couronnes entremêlées et enflammées, invoquèrent le Maelström sous forme solide. Ils conjurèrent des profondeurs une créature vivante et affamée, aux milliers d’yeux et aux têtes par centaines. La rage incarnée. »

Voici la description qu’en fit à son tour un archon guerrier Loyal au service de Ragathiel : « Les protéens l’invoquèrent et le Maelström se mit à trembler comme si quelque chose de terrible, serpentant sous les fondations du monde, avait remué dans le trouble de son sommeil pour répondre à leur supplication. »

Une dernière description, archivée dans les bibliothèques de l’Axis, fait référence à la gueule dévorante d’un serpent doré et à des pseudopodes façonnés dans le Vide céruléen, dévastant une légion d’inévitables.

S’il est impossible de déterminer ce qui résiste à toute définition intrinsèque, il existe quelques tentatives de recherches qui visent à en apprendre davantage sur ces dieux en dehors des présages et des prophéties délivrés par les seigneurs protéens, qui sont les seuls êtres jouissant d’une connexion et d’une compréhension plus grande que les kékétars eux-mêmes.

Seigneurs protéens

Différents du reste de leur espèce, les seigneurs protéens, uniques, transcendent la division de leurs semblables inférieurs à la fois en termes de forme et de puissance absolue. Les seigneurs protéens prêtent une oreille attentive à une ère infiniment plus ancienne que l’âge présent du cosmos, à des itérations antérieures du multivers ou, pourquoi pas, issues des profondeurs à la réalité ramifiée d’un Maelström plus profond et plus immense encore que ce que les sages mortels n’imaginent. Tandis que les différents chœurs se disputent ou complotent les uns contre les autres, chacun poursuivant ses propres interprétations de la volonté du Maelström, les seigneurs protéens ont leurs propres objectifs et ne font rien pour encourager ou entraver ce genre d’activités. Bien que certains affirment bénéficier d’une compréhension approfondie de la volonté de leurs dieux, les seigneurs n’essayent jamais de supplanter les méthodes des chœurs de kékétars ou autres, qui servent activement les Orateurs. Rares sont ceux qui connaissent la véritable apparence de ces êtres, s’ils ont seulement une forme réelle, la plupart d’entre eux se modifiant largement, même si beaucoup conservent des éléments spécifiques dans leurs mutations perpétuelles. Ces protéens uniques consacrent tous leurs efforts à veiller sur les dieux (intrigués par leur capacité à créer et à détruire) et à s’assurer de la défaite finale des forces de la Loi. Êtres incroyablement puissants, que seuls les Orateurs égalent, et équivalents des seigneurs démons et des seigneurs empyréens des autres royaumes, les seigneurs protéens refaçonnent et détruisent sans cesse de vastes royaumes au sein du Maelström, s’intéressant à l’occasion (et de manière apparemment aléatoire) aux richesses extérieures au chaos tourbillonnant. Menant au combat des légions de leurs frères inférieurs, ces êtres uniques et puissants provoquent des ravages destructeurs et bouleversants, ils conduisent des hordes de protéens à s’attaquer aux portes mêmes du Paradis, des Enfers et au-delà.

Célèbres seigneurs protéens

Issus des flux éternels du Maelström ou ayant toujours existé, les seigneurs des protéens incarnent le potentiel de toute chose, la mutabilité inhérente à toute création, la temporalité et la finitude ultime de tout ce qui est ou sera jamais. Certains sont plus célèbres que les êtres divins mentionnés ici, tandis que d’autres, comme l’inepte Mère des langues, l’informe Seigneur de l’entropie, le Gardien de la roue, omniscient, et le redoutable Seigneur de la démence, sont connus des autres races uniquement au travers de murmures affolés et de délires d’aliénés.

Ssila’meshnik. Sans doute le plus célèbre des protéens uniques, celui que l’on nomme le Seigneur sans couleur, Ssila’meshnik, apparaît comme un kékétar albinos, parfois avec trois couronnes imbriquées qui sont le sceau caractéristique de la caste. Le Seigneur sans couleur se montre, en de très rares occasions, à la cour de Pharasma, uniquement pour arbitrer des cas spécifiques ne répondant visiblement à aucune logique, même si chaque âme semble souvent liée à des évènements qui finissent toujours par avoir des répercussions sur le Maelström (répercussions qui, le plus souvent, ne se manifestent pas avant des décennies, voire des siècles). Évidemment, lorsqu’il fait son apparition, le seigneur protéen émerge de nulle part, généralement à la surprise troublée des serviteurs divins de Pharasma puisqu’il se manifeste sans la permission expresse de la déesse du destin, ce qui est normalement impossible. Cela dit, Ssila’meshnik fait toujours preuve de courtoisie et de respect lors de ses apparitions, même s’il n’affiche aucune des formes d’humilité qu’une divinité supérieure serait en droit d’attendre de lui.

Il’surrish l’Errant. Ce seigneur protéen insaisissable n’a pas de forme physique qui lui soit propre et se laisse emporter par le Vide céruléen tel un courant de lumière partiellement coalescente, clignotant entre les régions du plan sans rythme ni raison apparents, et disparaissant parfois dans les profondeurs pour des années ou des décennies. Lorsqu’il en a besoin, l’Errant modèle des corps physiques temporaires à partir de la matière brute du Maelström, comme il lui arrive aussi, de temps en temps, de posséder le corps d’un non natif non autorisé comme un diable, un archon ou un démon (mais, assez curieusement, jamais un autre protéen). Les corps affectés, possédés et créés rayonnent tous d’une intense lumière céruléenne interne, comme s’ils avaient été remplis de la substance condensée du Maelström lui-même. Ceux qui survivent à cette expérience décrivent leur possession comme quelque chose de similaire à la première communion superficielle d’un kékétar avec les Orateurs des profondeurs. Certains sages observent quelques similitudes entre Il’surrish et l’entité abyssale connue comme L’Éveillé, mais sans sa nature parasitique et maléfique.

Narriséminek le Sans-couronne et Faiseur de rois. Celui que l’on qualifie souvent de Médiateur des Orateurs se manifeste comme un simple naunet ou imentesh, prenant toujours l’apparence d’un protéen de la caste qu’il visite et portant toujours une cicatrice ou une brûlure circulaire sur le front ou au sommet du crâne, comme s’il avait porté une couronne ou un anneau brûlant qui l’avait mutilé. Il se manifeste spontanément, mais derrière lui apparaît un nouveau kékétar tenant sa cape.

Lorsqu’il se manifeste à un groupe de kékétars, Narriséminek apparaît comme un membre de leur caste, même s’il n’a pas de couronne, et dans tous les cas sa présence annonce une intensification et un changement de philosophie pour un chœur donné. Le Faiseur de rois n’informe jamais les kékétars de leur nouvelle redéfinition : en fait il semblerait que ces évènements l’attirent au moment où ils se produisent, de manière à ce qu’il s’assure que le chœur reçoive sa toute nouvelle vision des choses sans être interrompu.

Restaurer le Chaos

La où vont les protéens, le chaos les suit. Sur les bords du Maelström, où le plan de pur chaos érode inlassablement le firmament de la réalité statique, il n’en faut pas beaucoup pour que cèdent les lois naturelles. Les runes tortueuses et les flux infinis des protéens précipitent ce genre de dégradations, étendant les rives de leur royaume anarchique sans que ces intrus toujours changeants n’aient besoin de plus d’efforts. Mais dans les lieux où la source du chaos est moins présente, ces hérauts doivent emporter avec eux les outils de la dissolution. Un désordre aussi pur peut prendre deux formes : les rites insensés des kékétars et les mares de chaos primaire connues pour beaucoup comme les bassins d’entropie ou les fonts anarchiques. Tous affaiblissent la réalité du paysage qui les entoure, affectant des régions entières de phénomènes symptomatiques de l’effondrement de la réalité conventionnelle. Ces incidents bizarres sont largement qualifiés de flux d’entropie.

Les chœurs de kékétars sont bien connus pour leur capacité à invoquer des bizarreries des profondeurs du Maelström, des aspects des seigneurs protéens et d’autres phénomènes plus étranges encore. La plupart des connaissances que l’on a au sujet de ces rituels inquiétants viennent de récits qui concernent ceux qui se pratiquent sur les frontières des autres plans, où ils précipitent la chute de ces royaumes dans le tourbillon du chaos. Dans les lieux plus éloignés du Maelström, ces rituels peuvent engendrer des flux d’entropie et, à terme, la création de portails menant au royaume du chaos. Même si les kékétars peuvent avoir d’innombrables raisons insensées d’en appeler à l’un de leurs monstrueux demi-dieux, les effets altérant la réalité qu’emploient nombre de ces êtres participent à l’érosion des fondations planaires, précipitant la dissolution de ces royaumes au cœur du Maelström. Certains seigneurs protéens ainsi invoqués laissent leur empreinte sur les régions dans lesquelles ils sont appelés, déchirant le tissu de la réalité et provoquant des flux d’entropie qui affligent la zone. Dans les endroits souffrant déjà d’instabilité planaire, le passage d’un seigneur protéen pourrait même ouvrir de dangereux portails ou entraîner des failles s’enfonçant droit dans le chaos du Maelström.

Les protéens parviennent également à emporter avec eux d’étranges flaques d’énergie dorée scintillante qui seraient des manifestations semi-physiques du chaos fondamental. Conjurées hors du Maelström au moyen d’une magie connue des seuls protéens, ces fonts anarchiques apaisent leurs maîtres et leur permettent d’utiliser un puissant pouvoir magique. Néanmoins, on remarque facilement la présence de ces flaques dans une région donnée puisqu’elles génèrent des flux d’entropie qui gagnent en intensité et en fréquence tant qu’elles existent. Le pouvoir chaotique qui imprègne chaque font anarchique semble être directement proportionnel à sa taille, même si les non protéens ne comprennent que très mal les pouvoirs de ces mares de chaos. Tandis que certaines existent depuis des siècles sur certains plans et engendrent à peine plus que quelques rumeurs d’étranges phénomènes, d’autres commencent à trouer la réalité quelques semaines seulement après leur invocation : leurs effets semblent se manifester dans les pouvoirs des protéens alentours et dans la résistance fondamentale de la réalité environnante (concept que peu de non protéens peuvent espérer mesurer).

En général, les flux d’entropie sont des déchirures ou des erreurs dans la réalité, des altérations perceptibles des lois de la physique et de la raison qui permettent la réalisation de faits impossibles. Ces effets peuvent prendre n’importe quelle forme, mais deviennent de plus en plus graves avec le temps. Au pire, ils se manifestent sous forme de portails vers le Maelström, s’élargissant en failles béantes jusqu’à ce que la zone soit entièrement engloutie dans ce royaume sans loi ou que la source du chaos disparaisse. Le processus s’apparente au fait de trouer un tissu : au départ, on ne remarque aucun signe de dégât, mais avec le temps, des trous plus gros commencent à se former et deviennent rapidement des déchirures nécessitant de gros efforts de raccommodage. À mesure que les flux s’aggravent, la région s’aligne sur le chaos et présente des caractéristiques planaires hautement instables, jusqu’à devenir une île du Maelström.

La table qui suit présente plusieurs exemples de flux d’entropie mineurs que les PJ sont susceptibles de remarquer. Le MJ peut les inclure lorsque qu’ils traversent des zones d’activité protéenne fréquente (effets perceptibles des tentatives des êtres de chaos à défaire la réalité). S’ils sont rarement dangereux, ces troubles peuvent, avec le temps (parfois en plusieurs mois, d’autres fois en plusieurs siècles), éroder la structure sous-jacente d’un plan ou d’une région. Un personnage observant un évènement entropique, quel qu’il soit, et réussissant un test de Connaissances (plans) DD 30 reconnaît la manifestation du chaos comme un signe indiquant que la zone est instable et menace de s’effondrer, mais que cet effondrement est encore loin d’être imminent. Un MJ cherchant d’autres idées de flux d’entropie trouvera plusieurs suggestions utiles dans la table des inconvénients des objets maudits, page 542 du Manuel des joueurs.

Pour les MJ qui font jouer l’aventure de ce volume, La Fin de l’éternité, les flux d’entropie sont un très bon moyen de montrer aux PJ que le demi-plan de Kakishon, dans lequel ils sont piégés, est instable. Vous pouvez vous servir des flux entropiques quand vous le désirez (il est possible, par exemple, d’utiliser un flux d’entropie en lançant un dé et en consultant la table des monstres errants présentée dans le bestiaire de ce volume, page 77). Cela dit, vous pouvez également faire apparaître un flux d’entropie pendant un combat, pour aider ou pour gêner les PJ selon ce que vous préférez, afin d’adapter la difficulté de l’affrontement à un moment particulier.

Le Cloître

Parmi les royaumes en dérive du Maelström, le Cloître est une énigme. Simple imperfection parmi tant d’autres au milieu du royaume du chaos, ce site est fréquenté par des protéens qui travaillent sans cesse à la désintégration des particules de la réalité Loyale qui infiltre leur plan. Le Cloître apparaît comme une sphère irisée et miroitante, comme une grosse bulle de savon en plein cœur du Maelström. Les érudits planaires ont longtemps cru qu’il s’agissait du domaine d’un dieu mort ou mourant, fermé à tous à l’excep­tion de deux kabbales spécifiques de kékétars, le chœur de la Lumière mourante et le chœur du Double Déchu.

Pendant 3000 ans, aucun requérant ne s’est rendu au domaine, comme aucun serviteur divin ne l’a quitté pour accomplir la volonté de son dieu. En fait, ce royaume paraît abandonné et son créateur semble mort, à l’agonie ou cata­tonique. Mais comme pour le plan qui l’entoure, rien n’est aussi simple : les frontières du royaume sont restées tout à fait stables, ce qui n’aurait jamais dû arriver à moins qu’une divinité en maintienne activement la solidité contre les changements tourbillonnants du Maelström environnant. Si quelqu’un connaît les secrets de ce royaume, il s’agit des membres des deux chœurs protéens qui le visitent régulièrement, bien que jamais en même temps. Il sem­blerait qu’ils accèdent facilement aux frontières scellées les unes aux autres, s’approchant de la limite lumineuse et se livrant à quelques gestes rituels rapides de respect et de déférence (notions qui paraissent curieuses puisque les protéens se comportent rarement ainsi face au divin).

Flux d’entropie

d10 Flux d’entropie

1 Un arbre, un rocher ou un gros buisson change soudain de cou­leur puis devient transparent et intangible pendant 1d4 rounds avant de disparaître – cet objet pourrait également être celui qu’un PJ est en train d’escalader ou derrière lequel il se cache.

2 Dans un cube de 4,5 mètres de côté, l’air entourant un des PJ se transforme en une substance fluide ou semi-fluide – une eau savonneuse, du vin, un poison de contact, un cube gélatineux de taille TG etc. Ceux qui se trouvent dans la zone peuvent re­tenir leur respiration, suivant les règles de l’asphyxie à la page 447 du Manuel des joueurs, et peuvent nager dans le liquide normalement.

3 Des vibrations retentissantes, des sirènes stridentes et des hur­lements d’animaux déchaînés emplissent la zone sur 1,5 kilo­mètre de diamètre. Toutes les créatures situées dans la zone doivent réussir un jet de Vigueur DD 15 ou être assourdies jusqu’à 10 minutes après avoir quitté la zone ou que les bruits ont cessé. Ceux qui réussissent leur jet reçoivent quand même un malus de -10 à leurs tests de Perception. Toute communica­tion orale est impossible et tous les sorts et effets s’appuyant sur le son ou le langage échouent dans la zone du vacarme.

4 Un incendie se déclare soudainement, à partir d’un matériau qui normalement n’est pas censé brûler (comme une flaque d’eau, un cristal ou un morceau de glace); un PJ choisi au ha­sard doit réussir un jet de Réflexes DD 15 pour éviter de rece­voir 2d6 dégâts de feu de cette brusque explosion. Lorsque le feu a fini de se consumer, l’objet n’est pas endommagé.

5 Un animal amical ou un objet favori reçoit un score minime d’intelligence et un trait de caractère bizarre. Il conserve sa capacité à discuter avec les PJ pendant 1d6×10 minutes.

6 Le monde perd toutes ses couleurs pendant 10 minutes dans un rayon de 60 mètres. Pendant ce laps de temps, les créa­tures reçoivent un malus de -4 à tous leurs tests de Perception.

7 Un énorme requin, un calmar géant ou une autre créature aquatique tombe du ciel, recevant 20d6 points de dégâts de chute (et les infligeant également à tous les êtres sur lesquelles elle tombe et qui ratent un jet de Réflexes DD 15); si les dégâts ne la tuent pas, elle se met à suffoquer mais attaque toujours frénétiquement quiconque est à sa portée.

8 Un éclair de lumière bleue apparaît et tous les fluides dans un rayon de 30 mètres gèlent instantanément. L’eau, les objets alchi­miques, les potions et autres produits similaires se solidifient, restant gelés et inutilisables pendant 1 heure. Les objets gelés peuvent être dégelés à l’aide d’une torche ou d’un feu à raison d’1 litre ou 1 potion par minute.

9 Deux PJ voient leur esprit interchangé pendant 1 minute. Le MJ choisit deux joueurs et intervertit leur fiche de personnage le temps que dure l’effet.

10 Des grains de poussière se soulèvent du sol et fusionnent pour former un monstre – lancez un dé en vous référant à la table des monstres errants de la page 77 pour déterminer de quelle créa­ture il s’agit. Le monstre est enragé et attaque immédiatement les PJ – il a une RD de 10/adamantium et un bonus d’armure natu­relle de +4 (augmentant son FP de +1). Lorsque le monstre est tué, son corps tombe en poussière, révélant 1d6 gemmes aléatoires.

Références